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N’enterrons pas trop vite le moteur thermique !

Le secteur du transport (terrestre, aérien, maritime) représentant 24% des émissions de CO2 dans le monde, sa décarbonation est un objectif crucial dans la mise en œuvre de l’Accord de Paris de limitation du réchauffement climatique. Le responsable désigné est le moteur thermique (Moteur à Combustion Interne). En conséquence, la voie dans laquelle les constructeurs se sont engagés est sa substitution par le moteur électrique, alimenté par des batteries (BEV) ou de l’hydrogène avec le recours d’une pile à combustible (FCEV) qui transforme l’hydrogène en électricité.

Cette révolution vise à faire disparaitre l’usage des combustibles fossiles comme carburant des moteurs thermiques. Rappelons que l’Europe a fixé à 2035 l’arrêt de leur production, à une nuance substantielle près : la Commissions Européenne autorise les constructeurs à adapter les moteurs à combustion aux énergies propres.

Dans cette perspective, des constructeurs travaillent sur l’utilisation de l’hydrogène, directement comme carburant du moteur thermique, sans recours au moteur électrique, ni à une pile à combustible. C’est l’injection d’hydrogène, à la place de l’essence ou du gasoil, qui permet de déclencher l’explosion génératrice d’énergie et fait fonctionner le moteur thermique. En utilisant de l’hydrogène vert, dont la filière est dynamisée par la Commission Européenne avec des objectifs ambitieux (40 Mds€ d’investissements sur 2020-30), le moteur thermique n’émettrait quasiment plus de CO2 (baisse supérieure à 98% vs. 100% pour un FCEV).

Comment cette technologie se compare-t-elle aux autres dans la mobilité décarbonée ?

  1. Kawasaki a procédé à des tests qui montrent que le moteur thermique à hydrogène affiche une fiabilité, une durabilité et des performances supérieures au moteur électrique à hydrogène avec pile à combustible.

    Le tableau ci-après indique que le coût total de possession d’un poids lourds à moteur thermique hydrogène serait sensiblement inférieur à celui d’un FCEV. Sur la décennie en cours, le moteur diesel reste le moins onéreux, avec une hypothèse d’1,5€/litre contre environ 2€/litre actuellement. En retenant 2€/litre, le coût total du poids lourds diesel augmenterait de 290 k€ et perdrait son avantage compétitif, toutes choses égales par ailleurs !

    Comparaison du coût total de possession d’un poids lourd sur 5 ans à partir de 2025

    Source : AVL List GmbH, Westport fuel Systems
    NB : H2 (moteur thermique à hydrogène), FCEV (moteur électrique à hydrogène avec pile à combustible)

  2. Par rapport aux véhicules électriques à batterie, les avantages sont importants : base industrielle des moteurs thermiques considérable avec peu d’investissements additionnels à réaliser, absence d’utilisation de batteries dont la production est à 70% chinoise dans des conditions de durabilité très contestée, plein de carburant d’hydrogène en quelques minutes. La principale faiblesse réside dans la dépendance au développement d’une infrastructure quasi inexistante (production d’hydrogène vert, stations de ravitaillement) et très en retard par rapport à celle des véhicules électriques.

Les expériences et avancées récentes de moteurs thermiques à hydrogène sont nombreuses :

  • Toyota a adapté un petit moteur thermique 3 cylindres de 1000 cm3 à l’hydrogène.
  • L’Ifpen (Institut Français du Pétrole et des Energies Nouvelles) travaille avec Bosch, Renault Group, TotalEnergies et Faurecia pour adapter un utilitaire à l’hydrogène.
  • Yamaha a développé un moteur V8 thermique (une architecture vouée à disparaitre, fortement consommatrice de carburant et très émettrice de CO2) à l’hydrogène dont les performances sont du même niveau que celles obtenues avec de l’essence.
  • L’équipementier américain BorgWarner a dévoilé en février un système complet d’injection d’hydrogène rapidement commercialisable, qui ne nécessite que de légères adaptations du moteur thermique traditionnel.

A court-terme, cette évolution du moteur thermique devrait davantage concerner les transports ferroviaires, bus, poids lourds et maritime, comme pour la mobilité à hydrogène avec pile à combustible. Pour la mobilité individuelle, les véhicules électriques à batterie devraient conserver l’avantage en termes de coûts et de densité des infrastructures.

Mais la technologie du moteur thermique hydrogène existe, elle ne dépend pas de la Chine comme les batteries et l’enjeu financier est considérable, compte-tenu des capitaux investis dans la filière du moteur thermique. L’adapter pour le verdir permettrait aux constructeurs d’éviter de très importantes dépréciations d’actifs (stranded assets), de contribuer à la limitation du réchauffement climatique et de préserver dans une certaine mesure les emplois, très nombreux dans toute la chaine de valeur de cette industrie, notamment par rapport à une mutation vers le tout électrique.

Achevé de rédiger le 3 mai 2022

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