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Le plastique n’emballe plus

La découverte en 1997 par l’océanographe américain Charles Moor d’un véritable continent de plastique dérivant dans l’océan Pacifique et grand comme 6 fois la France a été la 1ère mise en évidence de la dépendance de nos économies développées à ces polymères difficilement recyclables. On estime que 70% des déchets plastiques rejetés en mer finissent par couler et affectent significativement la biodiversité marine. Les 30% restant se retrouvent sur les plages ou sont finalement emportés par les vents sous forme de nanoparticules.

Plusieurs études récentes et indépendantes viennent de montrer que ces nanoparticules se retrouvent dans les sols gelés ou les chaines de montagne. Les Universités d’Utrecht, Bruxelles et Copenhague ont ainsi mis en évidence leur présence en profondeur dans l’Arctique. En Suisse, l’EMPA (Laboratoire de la Science des Matériaux) a retrouvé ces nanoparticules dans les Alpes, apportées par la neige. On estime ainsi que 43 trilliards de particules fines atterriraient chaque année sur le territoire Suisse, représentant 3 000 tonnes. Contrairement aux microparticules, les nanoparticules traversent la barrière cellule-sang et pénètrent la circulation sanguine. Leurs effets sur la santé humaine sont potentiellement importants mais encore mal mesurés.

Malgré la pandémie et l’activité économique réduite, la production de plastique s’est encore fortement développée ces dernières années. Entre 2008 et 2020, elle a augmenté de 50%. La crise du Covid a généré la consommation de nombreux produits de santé produits ou empaquetés avec du plastique, alors que dans le même temps les divers confinements ont ralenti l’activité de recyclage.

Les pouvoirs publics ont commencé à mettre la pression sur les producteurs et utilisateurs d’éléments plastiques générant des déchets. Plusieurs polymères produits dans de nombreux secteurs d’activité économiques sont concernés par les plans de taxation qui sont à l’étude ou déjà mis en œuvre :

  • Le polyéthylène téréphtalate (PET) qui produit le déchet plastique le plus connu, celui des bouteilles
  • Le polyéthylène à haute densité (HDPE) utilisé dans les secteurs alimentaire, médical et chimique, sert à produire des réservoirs, des équipements sportifs, des tubes et des câbles
  • Le polyéthylène à faible densité (LDPE) plus souple est utilisé dans la fabrication de sacs poubelle, de films et sachets
  • Le polypropylène qui est utilisé dans la construction automobile est le plus résistant mais également potentiellement le moins recyclable

Parmi ces programmes de taxe et d’interdiction, on peut citer :

  1. Le "EU Plastic Packaging Levy" mis en œuvre depuis janvier 2021 : chaque tonne de plastique non recyclé est taxé à hauteur de 800 euros. Les États membres sont redevables de cette taxe à l’Union
  2. Les différentes législations nationales qui sont en train d’être mises en place : France en 2020 avec application en 2022, Espagne, USA en 2022, UK et Italie en 2023... même si elles sont toutes imparfaites car repoussant l’interdiction définitive à 2025 au mieux.

Ces textes affectent en grande majorité les plastiques non recyclés dits "vierges". Ils pourraient induire une différentiation de prix avec les plastiques recyclés.

Enfin, signalons le développement récent d’un marché du Crédit Plastique, à l’image du Crédit Carbone. La compensation n’est pas la panacée vers une économie durable. Elle a au moins le mérite de mieux identifier les acteurs et leurs "contributions".

Le recyclage est non seulement un élément majeur des politiques visant à réduire l’utilisation du plastique, c’est aussi un secteur économique qui se transforme.

Les efforts de recyclage portent essentiellement sur les plastiques d’emballage. La collecte et la transformation de ces plastiques se développe à nouveau, après une légère stagnation en début de période Covid. L’objectif Européen de recycler 55% des plastiques d’emballage consommés en 2030 incite les acteurs présents sur ce marché à prévoir des investissements lourds : les capacités de recyclage sont aujourd’hui bien inférieures à ce chiffre.

Si l’on regarde les taux de recyclage dans le monde, on constate une forte disparité. Le Japon avec un taux de 84% semble être le mieux disant. Mais sa définition du recyclage inclut l’incinération, ce qui n’est pas la norme dans les pays européens (UK et Union) qui affichent un taux de 30% environ. Sans surprise, aux USA le recyclage ne touche que 9% des plastiques "consommés".

Les techniques de recyclage sont aujourd’hui l’objet de recherches intensives, en particulier la technique dite "Déchets vers Énergie". Le plastique est en effet hautement calorifique et donc une source d’énergie importante. Cependant, la production de gaz toxiques pendant le processus doit être maitrisée afin d’éviter l’émission importante de GES.

La volonté de réduire la dépendance aux énergies fossiles pousse de nombreux pays à développer cette technologie. La Chine est en pointe sur ce segment. Elle a ainsi prévu de doubler ses capacités "Déchets vers Énergie" entre 2017 et 2025.

La recherche s’oriente également en Chine vers le plastique biodégradable, même si les conditions nécessaires à son développement ne semblent pas réunies (température, humidité...)

Les principaux secteurs économiques affectés par cette disparition souhaitée du plastique sont

  • Les Utilities qui participent à l’activité de recyclage et pourraient bénéficier de soutiens financiers des États, grâce aux taxes collectées
  • Le Secteur Bois et Papeteries pour qui l’emballage est un débouché en fort développement
  • Tous les secteurs liés à la consommation dont les coûts pourraient augmenter marginalement, avec l’incertitude sur la potentielle transmission de ces coûts dans les prix aux consommateurs

Achevé de rédiger le 31 janvier 2022

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