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Comment accélérer la transition énergétique et atteindre les objectifs de neutralité carbone en 2050, et dans le même temps protéger les industries européennes dans un environnement où le protectionnisme est de retour (comme le montre l’Inflation Reduction Act Américain) ? Le tout sans remettre en cause le dogme du libre-échange, un des fondements du modèle économique de l’Union européenne.

C’est le défi auquel s’est attaqué le Trilogue (Parlement, Commission et Conseil européens) en décembre dernier au cours d’une longue semaine de négociations intensives qui s’est achevée le 18 décembre 2022.

Le résultat s’appelle Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières (MACF). S’il doit encore être formellement validé, ce processus précise dès aujourd’hui les différentes étapes d’un plan ambitieux pour étendre les normes environnementales européennes à tous les acteurs économiques souhaitant échanger avec l’Union.

De quoi s’agit-il ?

Tout d’abord, de mettre en œuvre une proposition de Jacques Chirac, alors président de la République française, il y a plus de 20 ans : une taxe carbone sur les importations dans l’Union de certains produits identifiés comme les plus forts consommateurs de gaz à effet de serre. Parmi ceux-ci, l’acier, l’aluminium, le ciment, les engrais, l’électricité bien sûr et l’hydrogène.

Concrètement, les importateurs de ces produits devront acheter des certificats d’émission, comme s’ils étaient produits dans l’Union. Les distorsions de prix dues aux coûts de ces certificats exclusivement européens et qui désavantageaient les producteurs de l’Union devraient donc disparaître. À elle seule, cette mesure pourrait rapporter 14 milliards d’euros au budget européen.

Dans le même temps, et de manière progressive, les quotas d’émissions gratuits alloués chaque année à nos industriels vont être réduits pour disparaître totalement en 2034. Car l’idée n’est pas seulement de taxer les entreprises ou de favoriser celles installées en Europe. Il s’agit également de pousser chaque acteur économique, y compris en dehors de l’Union, à « transitionner » vers une économie bas‑carbone.

Une période d’observation va commencer en octobre 2023 qui permettra de mettre en place les détails techniques de cette taxe dont l’entrée en vigueur est prévue pour 2026‑2027.

On peut déjà poser une 1re limite à cette disposition : elle ne concerne pas pour l’instant les produits transformés, seulement les matériaux bruts. Ainsi, 40 % des émissions industrielles de l’Union ne seront pas couvertes par le mécanisme.

Autre point important, la liste des produits bruts concernés ne contient pas aujourd’hui certains plastiques ou produits chimiques que le Parlement souhaiterait rapidement inclure. Pour être totalement efficace, il est nécessaire que la mesure soit étendue à terme à tous les produits bruts importés.

L’accord trouvé par le Trilogue fait également mention d’une extension du marché des certificats Carbone au secteur maritime, à l’aérien (curieusement limité aux seuls vols intra‑européens), au chauffage des bâtiments et aux carburants routiers, à partir de 2027.

Si le prix prévu et plafonné à 45 euros la tonne pour le chauffage et le carburant peut paraître faible, ce surcoût qui affecterait directement les ménages n’est pas sans inquiéter. Il sonne en effet comme une réminiscence de l’origine du déclenchement de la crise des Gilets jaunes en France... D’autant qu’il est difficile d’imaginer que le MACF ne produira pas, dès sa mise en œuvre, une hausse des prix des produits transformés.

Et c’est bien là que le bât pourrait blesser : si l’objectif de réduction progressive de l’empreinte Carbone vers la neutralité en 2050 semble communément accepté, son prix doit apparaître acceptable pour les acteurs économiques, en particulier les plus faibles.

Cette dimension sociale a commencé à être intégrée dans la mise en œuvre de cette transformation du marché Carbone :

  • Il est d’ores et déjà prévu la possibilité de décaler à 2028 l’extension des certificats au chauffage et carburants, si d’aventure le pic inflationniste que nous connaissons aujourd’hui perdurait.
  • La création d’un « Fonds social pour le climat » doté de 86 milliards d’euros, en partie financé par les certificats Carbone, a été décidée pour permettre aux ménages les plus modestes et aux microentreprises de s’adapter aux nouvelles règles et aux surcoûts à venir.

L’ambition européenne d’être le 1er continent neutre Carbone est réelle et se traduit aujourd’hui par un plan élaboré qui ne manque pas d’atouts, mais y parvenir nécessitera d’emprunter avec prudence un long chemin de crête afin de ne pas fragiliser davantage des citoyens subissant aujourd’hui une situation économique qui se dégrade.

Achevé de rédiger le 6 mars 2023

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