RECHERCHEZ UN FONDS

Forêts et biodiversité : les enjeux et nos responsabilités…

Les forêts couvrent 46 % des terres européennes et compensent 20 % des émissions de CO2 de l'Union européenne. En France, en 1908, la forêt couvrait 19 % du territoire métropolitain, avec près de 10 millions d'hectares ; elle en couvre plus de 31 % soit 17 millions d’hectares aujourd'hui selon l'IGN (Institut National de l'Information Géographique et Forestière) dans sa dernière enquête statistique de l’Inventaire Forestier National.

Les forêts jouent un rôle essentiel dans l’atténuation du changement climatique (puits de carbone net de près de 8 milliards de tonnes de CO2e par an selon Global Forest Watch) et de la perte de biodiversité (échantillonnage d’espèces selon la densité et la hauteur des arbres...), deux défis majeurs auxquels nous sommes confrontés actuellement.

Quels sont les enjeux et quelles sont nos responsabilités ?

La production biologique « nette », c’est-à-dire la croissance des arbres, mortalité déduite, est supérieure aux prélèvements. En revanche, cette production biologique « nette » est aujourd’hui de 4,8 m3 par hectare et par an, en ralentissement de 10 % environ (à hauteur de 5,3 m3 par hectare il y a une décennie). On assiste donc à une augmentation significative de la mortalité des arbres, qui équivaut à 0,4 % du volume de bois vivant, soit plus de 50 % entre les périodes 2005-2013 et 2012-2020, les facteurs étant nombreux (sécheresses, canicules, insectes, champignons, bactéries...).

Rappelons brièvement que l’Europe de l’Ouest se réchauffe plus vite qu’attendu avec un grand nombre de stress hydriques, dus aux évènements de sécheresse en augmentation, rendant au fil du temps les arbres plus sensibles aux parasites. L’IGN rappelle que la récurrence d'épisodes de sécheresse est propice aux insectes xylophages. Au ralentissement de la croissance des arbres et à l’augmentation des prélèvements s’ajoute donc la hausse de la mortalité. Pour sa part, 47 % de la forêt française est constituée de peuplements dits mono-spécifiques, c'est-à-dire pour lesquels une essence occupe plus de 75 % du « couvert » dans l'étage dominant (hauteurs). Et force est de constater que certains arbres ne sont plus adaptés au climat dans lequel ils évoluent.

Mais le véritable problème est la faible valeur économique attribuée à la forêt qui favorise donc les coupes rases, soit « l’abattage de l’ensemble des arbres d’une parcelle ». Certains rapports révèlent que :

  • 87 % des projets financés par les plans de relance nationaux impliquent des coupes rases ;
  • Dans 83 % des cas, les plans permettent des plantations en monoculture ; dans 17 % des cas restants (pour une parcelle de plus de 10 hectares), seule une très faible diversification est exigée ;
  • Le douglas, arbre le plus planté, car réputé le plus productif à court terme, n’est pas particulièrement bien adapté au changement climatique.

L’essence la plus plantée à l’aide du plan de relance français fin 2021 est le douglas

Source : Direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises

Aujourd’hui, de nouvelles pratiques sylvicoles (gestion de la forêt) sont testées grandeur nature : études d’espèces peu connues sur le territoire (provenance méditerranéenne ou orientale), plus résistantes à la sécheresse, mais pas forcément au gel des montagnes ; mélanges d’espèces pour augmenter la résilience, avec plusieurs types de modalité, en bande, par ligne, pied à pied, en bouquet... ; accroissement des puits de lumière, soit des « éclaircies » suivant un diagnostic sanitaire pour favoriser les arbres les plus résistants et le retour naturel de la biodiversité.

En effet, « Une stratégie d'adaptation ne peut se résumer à un programme massif de plantations pour remplacer les forêts existantes », Tribune de 600 scientifiques et acteurs de la filière forêt-bois (15 janvier 2022) : les forêts sont des écosystèmes qui possèdent leur propre dynamique. Le prélèvement des grands arbres (abattage directionnel) arrivés à maturité permet d’ouvrir des puits de lumière permettant aux jeunes pousses de prendre le relais, ou aux autres arbres d’accéder à la canopée. De même, une plus grande diversité d’arbres signifie également une plus grande diversité d’espèces animales et microbiennes qui protège l’ensemble de la forêt contre les espèces nuisibles et les agents pathogènes et ainsi la rendre plus résistante aux pressions extérieures, telles que les effets du changement climatique.

Ce qui n’est pas le cas de la coupe rase qui consiste à couper tous les arbres d'une parcelle, laissant le sol à nu, amplifiant ainsi les effets néfastes de la sécheresse ou de la canicule sur le milieu naturel.

Ainsi, pour une forêt « jardinée » :

  • La plantation n’est recommandée que lorsque la régénération naturelle n’est pas suffisante en quantité ou en qualité ;
  • Il convient de favoriser de légères coupes (chemins) en irrégulier et un abattage directionnel (gestion de la lumière pour la poussée) en période sèche pour éviter de tasser la terre ;
  • Il est recommandé l’arbitrage des genres, essences et âges ; 1 m de diamètre pour la coupe (0,4 actuellement pour le diamètre d’exploitabilité).

Les enjeux en matière de biodiversité intègrent la gestion forestière ; l’analyse du plan de relance de la Commission européenne indique en effet que la mesure « Forêts » doit être conforme au principe « ne pas causer de préjudice important » :

  1. Garantir le bon état de conservation des habitats et espèces... ;
  2. Exclure l’utilisation ou la libération d’espèces exotiques envahissantes ;
  3. Exclure l’utilisation d’espèces non indigènes, sauf lorsqu’il peut être démontré que l’utilisation des matériels forestiers de reproduction aboutit à un état favorable et approprié des écosystèmes ;
  4. Garantir la préservation et l’amélioration de la qualité physique, chimique et biologique des sols ;
  5. Encourager les pratiques respectueuses de la biodiversité et propices à l’amélioration des processus naturels des forêts...

Nous devons « faire preuve de paresse raffinée », comme le recommandait un jeune agrosylviculteur suisse il y a 130 ans, qui prônait la forêt jardinée essentielle pour l'adaptation et la résilience locales...

Achevé de rédiger le 7 novembre 2022

Ce document a été produit à titre d’information seulement, il ne constitue pas un conseil en investissement. La référence à certaines valeurs est donnée à titre d’illustration, elle n’a pas pour objectif de promouvoir l’investissement en direct dans ces instruments. Crédit Mutuel Asset Management et son personnel ne sauraient être tenus responsables de toute décision prise ou non sur la base d’une information contenue dans ce document, ni de l’utilisation qui pourrait être faite par un tiers. Toute reproduction de ce document est formellement interdite sauf autorisation expresse de Crédit Mutuel Asset Management. Crédit Mutuel Asset Management est une entité de Crédit Mutuel Alliance Fédérale.