La compensation carbone consiste à contrebalancer son empreinte carbone par le financement de projets de réduction d'autres émissions ou de séquestration de CO2 (le stockage à long terme hors de l'atmosphère). Elle est l’un des outils disponibles pour atteindre la neutralité carbone (zéro émissions nettes) dans le cadre du réchauffement climatique.

Isabelle Delattre

Directrice Finance Responsable
Crédit Mutuel Asset Management

Alors que penser de certains grands groupes comme Air France qui annonce s’engager, à partir du 1erjanvier 2020 à compenser les émissions de CO2 de tous ses vols intérieurs en France, pour « verdir ses voyages ». En Suède, le « flygskam », apparu récemment, soit la honte de prendre l'avion à cause de son impact sur le réchauffement climatique, pousse les compagnies aériennes à adopter une attitude plus vertueuse.

Pour effectuer cette compensation, les compagnies choisissent de financer par exemple des programmes pour la préservation des forêts primaires, la plus connue étant la forêt amazonienne, au travers de la plantation de millions d'arbres pour absorber le CO2 anthropique. Pour la population de nombreux pays, les forêts sont une importante source d’énergie même si, rappelons-le, celles-ci contribuent aussi, grâce à la photosynthèse, à l’absorption de CO2. Ainsi, la forêt amazonienne, considérée comme étant l’un des plus importants puits de carbone de la planète, a été soumise à une intense pression de l'activité humaine au cours des dernières décennies dans le sillage du développement économique.

Cependant, la compensation carbone se doit d’être fortement encadrée car elle doit répondre à des règles très strictes : la mesurabilité sur les émissions évitées par un tiers indépendant,la vérifiabilité des économies, la permanence des émissions évitées sur au moins 7 ans et l’additionnalité par rapport à une situation de référence connue.

Notons qu’une analyse, validée en mars 2016 sur la compensation carbone, de l’institut allemand Öko, conclue que sur 5 655 projets étudiés, 85 % d’entre eux avaient une « faible probabilité » d’assurer les réductions d’émissions promises et ainsi que l’additionnalité du projet. Seuls 2 % des projets satisfaisaient les critères de qualité requis. En résumé, la faible qualité des projets validés ne permet pas de penser que la compensation carbone du protocole de Kyoto eut été efficace. Par ailleurs, dans certains cas cela poussait les États à ne pas adopter de réelles politiques de réduction de leurs propres émissions...

Alors promouvoir l’innovation pour réduire est probablement plus efficace que de compenser ; c’est aussi l’avis du groupe Saint-Gobain qui préfère « ne pas s’autoriser la compensation pour ne pas détourner l’attention... ».

Achevé de rédiger le 15/01/2020